Reynaud & Gaillard Architectes : deux amis, deux parcours, deux caractères, une vision commune

Amis de longue date, Patrice Reynaud et Philippe Gaillard sont associés depuis près de 20 ans au sein de leur agence d’architecture. Référence dans le domaine du luxe, le cabinet a également signé la scénographie de la messe papale qui s’est tenue à Genève en 2018. Leur collaboration avec Swissroc grandit au quotidien avec plusieurs projets en vue.

Vous êtes associés depuis 2001, comment vous êtes-vous rencontrés, comment fonctionne votre binôme ?

Patrice Reynaud : Avant de travailler ensemble, nous étions amis. Nous avons évolué dans des structures différentes avant de regrouper nos bureaux. Tandis que Philippe travaillait avec son père, mon bureau a commencé à prendre un peu de volume. Nous étions tournés plutôt vers la rénovation et la réalisation d’immeubles neufs. Nous nous sommes retrouvés bloqués sur un projet, j’ai demandé à Philippe de me donner un coup de main et  nous avons réussi à résoudre nos problématiques. C’est ainsi que notre collaboration a débuté.

Est-ce que vous êtes complémentaires au sein du bureau ?

Philippe Gaillard : Je m’occupe plutôt de la partie architecture, tandis que Patrice est un expert de la restauration. Cependant, lorsqu’on nous demande séparément de choisir un échantillon,  même si l’on passe l’un après l’autre, nous avons toujours le même avis. Nous avons des caractères différents : Patrice est plus impulsif, je suis quelqu’un de plus réfléchi. La somme des deux caractères se traduit par un véritable équilibre au sein du bureau.

M. Reynaud, vous avez débuté votre carrière à New York chez Voorsager & Mills. Que vous a apporté cette expérience américaine ?

Patrice Reynaud : C’est un monde très différent aux États-Unis. L’architecte ne va pas sur le chantier, il se concentre sur le projet, les plans d’exécution. L’architecte réalise un descriptif, des plans, mais n’a quasiment jamais de contact avec l’entrepreneur général et encore moins avec les artisans spécialisés. J’ai été surpris par le retard considérable des Américains dans de nombreux domaines, l’éclairage, le chauffage, la climatisation, l’isolation… Je pensais arriver au XXIe siècle, j’ai pu voir à quel point ils étaient en retard par rapport aux techniques suisses de l’époque. La différence se trouve dans le pragmatisme, le volume et les échelles des chantiers, bien différentes de la Suisse. On pourrait presque qualifier cela d’architecture à la chaîne. J’ai visité, par exemple, un bureau avec près de 800 collaborateurs…

M. Gaillard, l’architecture est chez vous une histoire de famille, votre père était lui-même très reconnu, ayant remporté plus de 35 prix ou distinctions. Vous êtes né avec l’architecture dans le sang…

Philippe Gaillard : Mon père était effectivement un passionné d’architecture, il dessinait toute la journée, partout, sur les nappes, sur les tables… Il a transmis cette passion à toute la famille. Il était ainsi logique de s’inscrire dans la même lignée – mes deux sœurs ont également suivi cette voie. Mes premiers projets lui ressemblaient beaucoup, ils ont évolué ensuite au fil des années. Tous les édifices qu’il a pu concevoir m’ont enthousiasmé. Il a réalisé des bâtiments mythiques. J’ai en tête l’exemple d’un projet datant des années 50, novateur pour l’époque, au Grand-Saconnex, avec une couronne sur trois étages qui se fond dans le paysage, malgré une densité importante, ou son premier projet à la Chaux-de-Fond, l’immeuble Numaga. C’était un avant-gardiste, un précurseur. J’ai travaillé avec lui, j’ai essayé de le challenger, mais il aimait bien avoir le dernier mot !

En quoi la dimension internationale de votre agence est-elle un plus par rapport à la concurrence ?

Patrice Reynaud et Philippe Gaillard : Nous avons mis au point une structure où nous sommes habitués à travailler avec des architectes étrangers, avec des clients qui ont leurs propres décorateurs venus de différents pays. Au sein du bureau, la majorité des collaborateurs parle plusieurs langues. Nous sommes parfois plus que de simples architectes, nous essayons de satisfaire au mieux nos clients et les grands noms de l’architecture avec qui nous collaborons. Ces derniers cherchent une structure où ils peuvent avoir de l’écoute et notre objectif est de transcrire les projets et les informations transmises par nos confrères. Les règlements ici sont très différents et plus que les normes, la difficulté vient de l’interprétation des autorités locales qui sont parfois réfractaires à une vision nouvelle, extérieure. On cherche à raffiner ce rapport et trouver un compromis qui puisse satisfaire tout le monde.

L’équipe du bureau Reynaud & Gaillard Architectes.

Vous avez également oeuvré dans de nombreux secteurs d’activités, avez-vous une appétence particulière pour l’un d’entre eux ?

Patrice Reynaud : Pour ma part, il s’agit de la restauration de bâtiments patrimoniaux. Pour cela, il n’y a pas besoin de remonter jusqu’au XVIIIe siècle, le XXe siècle fait déjà partie du patrimoine. Le travail est intéressant lorsqu’on parle de bâtiments anciens, protégés ou classés, il l’est encore plus pour les bâtiments plus récents, car il est plus difficile de restaurer un immeuble moderne qu’un ouvrage du XIXe. Nous avons des doutes et des hésitations car nous ne sommes pas encore au point avec les techniques de restauration de ces bâtiments, en matière d’isolation notamment.

Philippe Gaillard : Pour moi, tous les projets sont intéressants, qu’il s’agisse d’un logement, d’un commerce, d’un restaurant… chaque nouveau projet est un beau challenge et nécessite une remise en question pour l’aborder au mieux.

Vous êtes une référence internationale dans le domaine du luxe et des bâtiments de standing.  Comment peut-on caractériser la “signature” Reynaud & Gaillard architectes ?

Patrice Reynaud et Philippe Gaillard : L’architecture commerciale ou industrielle reflète plus le luxe que l’architecture résidentielle. Ce que l’on cherche à faire en priorité, c’est quelque chose d’intemporel. Le luxe est dans la finition, le  volume et l’espace. Quoi qu’il en soit, le luxe est éphémère et dépend de nombreux facteurs, notamment des matériaux.

Vous avez signé la scénographie de la messe papale à Genève en 2018. Que retenez-vous de cette expérience ? Est-ce un moment à part dans une carrière, de par l’envergure d’une telle manifestation ?

Patrice Reynaud et Philippe Gaillard : Nous avons vu le Pape de près – l’une de nos collaboratrices a même eu le privilège de le rencontrer. Tout d’abord, il faut souligner que le programme donné par le Vatican était d’une clarté absolue, avec un cahier des charges extrêmement précis. Nous n’avons eu que peu de temps pour réfléchir, il a fallu prendre des décisions rapidement. Nous avons dû dérouler le fil de nos travaux en accéléré, car nous avions seulement un mois et demi pour désigner les entreprises, manier les 300 personnes qui ont travaillé jour et nuit. Il nous a fallu par exemple trouver 40 000 chaises en dix jours!

Scénographie de la messe papale. Genève, 2018.

Nous avons voulu réaliser quelque chose de simple et proche des gens, avec une décoration qui n’était pas trop “pompeuse”, malgré les ors du Vatican.  Il fallait à la fois caractériser le lieu avec des décors rappelant Genève, la Suisse et les Alpes ; ainsi que l’événement, avec les symboles du catholicisme que sont la croix ou les oliviers  tout en mettant cela en relation avec le diocèse genevois qui avait réalisé les invitations. En outre, nous avons voulu faire un événement écologique, zéro déchet. Chaque entreprise a récupéré les éléments qu’elle a installés, qu’il s’agisse des palissades, de la scène… Les arbres bénis par le pape ont connu un grand succès ! Il y a eu beaucoup de stress avant la manifestation, beaucoup d’angoisse pendant, et un peu de déprime après. Nous sommes passés très rapidement de la liturgie à l’occasion, puisqu’il a fallu tout démonter dans la nuit pour laisser la place le lendemain au salon de la voiture d’occasion…

L’architecture est en constante mutation. Quel regard portez-vous sur votre métier et sur son évolution dans les années à venir ?

Patrice Reynaud et Philippe Gaillard : Un regard plutôt pessimiste. On souhaite beaucoup de courage à la nouvelle génération qui s’installe. À moins d’être dans une niche spécialisée – ce qui est notre cas – les jeunes qui débutent doivent avoir les reins solides. Il faut avoir conscience du fait qu’ici, à Genève, pour un projet d’immeuble dans une zone constructible, si tout se passe bien, la réalisation peut prendre six ans, et si tout se passe mal, le projet peut ne jamais sortir de terre ! Les petits bureaux font de l’overbooking car ils savent que 20 à 30% des projets peuvent s’arrêter, à cause des recours des voisins, des permis qui ne sont pas bons, du changement d’avis d’un client…  Il faut un bon background pour avoir suffisamment de clientèle mais aussi disposer d’un fond qui permette de faire tourner un bureau et de partager les risques si un projet tombe à l’eau. Il faut ajouter le fait que certains concours sont remportés par des grands bureaux internationaux, qui ont parfois peu de travail chez eux et disposent des équipes nécessaires pour travailler sur des projets en Suisse.

Avec Swissroc, vous êtes intervenus sur différents projets de rénovation dont celui d’une villa de luxe à Vésenaz ou encore l’hôtel particulier Etienne-Dumont. Que retenez-vous de votre collaboration avec Swissroc ?

Patrice Reynaud et Philippe Gaillard :  Nous avons plusieurs projets communs en vue. Swissroc est une jeune société qui a une vitesse de croissance impressionnante. Elle fait preuve de beaucoup de réactivité, d’une écoute du client sans faille, avec une grande qualité de ses collaborateurs. Nous avons pu les voir à l’oeuvre sur des dossiers complexes, concernant les budgets, les délais, le patrimoine ou la relation client. À chaque fois, la société a fait appel aux bonnes personnes, aux bons endroits. Nous avons une très bonne collaboration et nous n’avons aucun doute sur le fait qu’elle va durer dans le temps.

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