favre & guth sa architectes associés est aujourd’hui l’un des bureaux d’architectes les plus établis de la place genevoise. Qui plus est, un de ceux qui a construit le plus de logements dans la région genevoise. A sa tête, quatre associés dont Patrice Bezos et Nabil Oulhaci. Deux générations d’architectes aussi passionnés que complémentaires, qui prônent une approche responsable de l’architecture, respectueuse de la société et du territoire.
En 2017, favre & guth sa a fêté ses 50 ans d’existence. Comment expliquer une telle longévité ?
Patrice Bezos : C’est avant tout le résultat d’une culture d’entreprise, un état d’esprit qui a été instauré par les fondateurs du bureau, Antoine Guth et René Favre et qui s’est transmis au fil des générations d’associés et de collaborateurs. Alors que j’étais stagiaire, Antoine Guth m’a demandé ce qui était le plus important pour moi dans l’architecture. J’ai parlé d’échelle, d’harmonie, etc. Il m’a répondu que je n’y étais pas du tout et que la chose la plus fondamentale était de trouver un client, parce que sans client, il n’y a pas d’architecture. Ensuite, vient l’engagement aux côtés du Maître d’ouvrage dans le respect de ses préoccupations et des contraintes qui caractérisent un projet.
M. Bezos, vous avez débuté au sein du bureau en tant que stagiaire, quatre ans plus tard, vous devenez associé puis président à 31 ans. Un parcours sans faute…
P. B : C’est au contraire un parcours avec beaucoup de fautes, notamment des fautes construites. Le plus important reste néanmoins de faire des choses dont on est convaincu à l’instant T. J’ai eu beaucoup de chance d’être accompagné par des personnes comme René Favre et Antoine Guth. Cela fait 39 ans que j’évolue au sein de ce bureau, il y a eu des moments faciles et d’autres moins. Nous sommes aujourd’hui 40 collaborateurs. Cela représente beaucoup de charges et de responsabilités pour le chef d’entreprise que je suis.
A côté du bureau, vous êtes très engagé dans le milieu associatif. Vous avez notamment présidé l’AGA (Association genevoise d’architectes) et la FAI (Fédération des architectes et ingénieurs de Genève) et étiez membre de la Commission d’architecture et de la Commission d’urbanisme. Qu’est-ce que cela représente pour vous ?
P.B : D’origine française, je suis arrivé à Genève à l’âge de 14 ans et je suis reconnaissant d’avoir pu y vivre toutes ces années. A travers cet engagement associatif, j’essaye de rendre un petit peu à ce canton en veillant à garantir une certaine qualité architecturale et en défendant la profession d’architecte. C’est une activité très prenante, mais qui m’a toujours beaucoup apporté. Cela m’a permis d’avoir une connaissance étendue des mécanismes administratifs et politiques locaux, et de nouer des contacts avec des confrères dont certains sont devenus des amis.
Des activités qui vous ont permis également de nouer des contacts étroits avec les politiques. En quoi immobilier et politique sont des univers liés ?
P.B : Politique vient du terme Polis, qui signifie la ville. La politique à un impact direct sur la ville et l’architecte urbaniste que je suis est conscient que chaque nouveau bâtiment modifie la ville. C’est un acte violent par rapport au territoire. Le dialogue avec la société, représentée par les politiques est donc essentiel pour veiller à la qualité architecturale. Nous sommes d’ailleurs souvent auditionnés pour statuer sur différents projets de loi qui ont trait à l’aménagement du territoire.
Justement, la densification du territoire est un enjeu majeur à Genève. Que répondez-vous aux personnes qui pensent que densification et qualité de vie sont incompatibles ?
P.B : Qu’ils ne pourront pas tout avoir. Qu’à un moment donné, il faudra faire un choix et définir des priorités. Si l’on veut sauvegarder des terres agricoles pour produire de la nourriture et veiller à la préservation de la faune et de la flore, ce qui est le sens de la LAT (Loi sur l’aménagement du territoire), il faut densifier la ville. Cela ne signifie pas construire n’importe comment. Des règles encadrent la densification. Le plus important est de créer des zones de rencontres, de bien-être et de sociabilité.
Quels sont les grands défis de l’architecture aujourd’hui ?
Nabil Oulhaci : Ils sont nombreux. Il faut s’adapter aux nouveaux outils numériques qui influent sur la pratique de notre profession, mais aussi aux nouveaux modes de consommation avec des gens qui veulent tout et tout de suite. Autre enjeu, l’agriculture urbaine, qui implique de penser autrement les bâtiments et l’espace urbain en général tout comme les questions de mobilité douce. A cela, s’ajoute la responsabilité environnementale de l’architecte qui doit continuer d’innover pour construire la ville de manière durable.
Le quartier de l’Etang à Vernier, le plus gros projet privé de Suisse, pour lequel favre & guth sa est l’architecte en chef
P.B : J’entendais récemment à la radio que le meilleur immeuble est celui qu’on ne construit pas. Sauf que les gens doivent bien habiter quelque part. J’ai peur qu’on se retrouve avec d’un côté les pro-Trump et de l’autre les extrémistes écologistes qui pensent au détriment de l’être humain. L’architecte et les autres professionnels de la construction doivent participer à ce débat et amener des solutions.
Qu’est-ce qui caractérise l’architecture favre & guth sa ?
N. O : Nous nous refusons à avoir un style. Nous prônons une architecture contextuelle, c’est-à-dire qui s’élabore selon les données circonstancielles du projet. Ainsi, le programme, le lieu, la situation géographique ou encore le budget constituent un ensemble de paramètres qui guident la création architecturale avec pour maître-mot la qualité. Une qualité au service de nos clients, des habitants mais aussi de la société toute entière à travers l’aspect permanent de nos interventions sur le territoire.
Le bureau favre & guth sa architectes associés, route des Acacias à Genève.
P. B : L’architecte doit arriver à traduire l’exigence du client et de la société par rapport à un environnement. L’adaptation est fondamentale. Nous sommes des traducteurs, nous devons d’abord ressentir le lieu avant toute chose.
Vous avez travaillé avec Swissroc sur différents projets. Que retenez-vous de cette collaboration ?
N. O : Swissroc est une jeune entreprise avec une vision novatrice de l’immobilier. Elle possède également un atout majeur, le BIM. Une méthodologie de travail développée à l’interne qui représente un véritable avantage concurrentiel.
P. B : Je trouve très enthousiasmant la façon dont Swissroc aborde le domaine de l’immobilier. J’ai rencontré des personnes dynamiques, très organisées, rigoureuses et surtout très à l’écoute. Ils sont dans une dynamique de collaboration particulièrement constructive.